J’entretiens avec la mémoire un drôle de rapport. Je me souviens de ces feuilletons de science-fiction où l’être humain développait des facultés particulières : L’Homme invisible, L’Homme qui valait trois milliard, Super Jamie, L’Homme de l’Atlantide, des personnages aux histoires qui ont créé un imaginaire incroyable dans mon cerveau. Une question – ou une crainte – s’est alors glissée – non pas comme celle de l’acteur François Berléand qui croyait être le fils de l’Homme invisible ! – mais plutôt celle de pouvoir être pris pour quelqu’un d’autre, que mon identité soit « récupérée », que je sois « copié », que je me retrouve dépossédé de ma mémoire, que quelqu’un d’autre s’en empare. Terrible imagination. Terrible pensée. De là ma réflexion permanente sur la question de l’identité et de la mémoire. Être c’est se rappeler. Comment tout cela fonctionnait-il ?
 
L’écrivain Milan Kundéra a écrit sur la mémoire et il m’a passionné. Dans son livre Le Livre du rire et de l’oubli, c’est bien cette idée de transition, de passage qui est évoqué en sous-main, comme dans l’Insoutenable Légèreté de l’être, la mémoire est mis en procès : de quoi se souvenons-nous finalement ?
Et depuis, les scientifiques ont découvert que la mémoire reconstruit en permanence les souvenirs.
Nous nous rêvons avec une identité stable mais en vérité tout bouge incessamment.
Michaël Therrat
Il existe un ancien dicton indien qui dit : « Quelque chose ne vit que tant que la dernière personne qui s’en souvient. Mon peuple a appris à faire confiance à la mémoire au cours de l’histoire. La mémoire, comme le feu, est rayonnante et immuable, tandis que l’histoire ne sert que ceux qui cherchent à la contrôler, ceux qui éteignent la flamme de la mémoire afin d’éteindre le feu dangereux de la vérité. Méfiez-vous de ces hommes car ils sont dangereux et imprudents. Leur fausse histoire est écrite dans le sang de ceux qui pourraient se souvenir et chercher la vérité.
~Floyd ‘Red Crow’ Westerman